Cet article détaille une démonstration du théorème de Sylow, un résultat fondamental dans la théorie des groupes finis. Ce théorème fournit des informations précieuses sur l’existence et les propriétés des sous-groupes d’un ordre donné dans un groupe fini.

Enoncé du théorème

Soit \(G\) un groupe fini d’ordre \(n\), et soit \(p\) un nombre premier. On écrit \(n = p^{\alpha}m\), où \(\alpha \geq 1\) et \(p\) ne divise pas \(m\).

  1. Premier théorème de Sylow : \(G\) possède au moins un sous-groupe d’ordre \(p^{\alpha}\). Un tel sous-groupe est appelé un p-sous-groupe de Sylow de \(G\).
  2. Deuxième théorème de Sylow : Tous les \(p\)-sous-groupes de Sylow de \(G\) sont conjugués.
  3. Troisième théorème de Sylow : Le nombre \(n_p\) de \(p\)-sous-groupes de Sylow de \(G\) vérifie :
    • \(n_p \equiv 1 \pmod{p}\)
    • \(n_p\) divise \(m\)

Démonstration du théorème de Sylow

1. Premier théorème de Sylow : Existence d’un \(p\)-sous-groupe de Sylow.

On procède par récurrence sur l’ordre de \(G\). Si \(|G| = p\), le résultat est trivial. Supposons le résultat vrai pour tout groupe d’ordre strictement inférieur à \(n\). On considère l’action de \(G\) sur lui-même par conjugaison. L’équation aux classes s’écrit :

\(|G| = |Z(G)| + \sum_{i=1}^r [G:Stab_G(x_i)]\)

\(Z(G)\) est le centre de \(G\), et les \(x_i\) sont des représentants des orbites non réduites à un point. Si \(p\) divise \(|Z(G)|\), alors par le théorème de Cauchy, \(Z(G)\) possède un sous-groupe \(N\) d’ordre \(p\). \(N\) étant dans le centre, il est distingué dans \(G\). On considère alors le groupe quotient \(G/N\), d’ordre \(p^{\alpha-1}m\). Par hypothèse de récurrence, \(G/N\) possède un \(p\)-sous-groupe de Sylow \(H’\) d’ordre \(p^{\alpha-1}\). L’image réciproque \(H\) de \(H’\) par la projection canonique \(G \to G/N\) est un sous-groupe de \(G\) d’ordre \(p^{\alpha}\), donc un \(p\)-sous-groupe de Sylow.

Si \(p\) ne divise pas \(|Z(G)|\), alors il existe \(i\) tel que \(p\) ne divise pas \([G:Stab_G(x_i)]\). Or \(p^{\alpha}\) divise \(|G| = [G:Stab_G(x_i)]|Stab_G(x_i)|\), donc \(p^{\alpha}\) divise \(|Stab_G(x_i)|\). Comme \(x_i \notin Z(G)\), on a \(Stab_G(x_i) \neq G\), et par hypothèse de récurrence, \(Stab_G(x_i)\) contient un \(p\)-sous-groupe de Sylow de \(G\).

2. Deuxième théorème de Sylow : Conjugaison des \(p\)-sous-groupes de Sylow.

Soient \(S\) et \(S’\) deux \(p\)-sous-groupes de Sylow de \(G\). On fait agir \(S\) sur l’ensemble \(X\) des conjugués de \(S’\) par conjugaison. L’équation aux classes s’écrit :

\(|X| = \sum_{i=1}^s [S:Stab_S(x_i)]\)

où les \(x_i\) sont des représentants des orbites. Or \(|X|\) est une puissance de \(p\) (car tous les conjugués de \(S’\) sont des \(p\)-sous-groupes de Sylow). Si toutes les orbites étaient non réduites à un point, \(p\) diviserait chaque terme de la somme, donc \(|X|\), ce qui est absurde. Donc il existe une orbite réduite à un point, c’est-à-dire un conjugué \(gS’g^{-1}\) de \(S’\) tel que pour tout \(s \in S\), \(s(gS’g^{-1})s^{-1} = gS’g^{-1}\). Donc \(S \subset N_G(gS’g^{-1})\), le normalisateur de \(gS’g^{-1}\) dans \(G\). Or \(gS’g^{-1}\) est un \(p\)-sous-groupe de Sylow de \(G\), donc de \(N_G(gS’g^{-1})\), et \(S\) est aussi un \(p\)-sous-groupe de Sylow de \(N_G(gS’g^{-1})\). Comme \(gS’g^{-1}\) est distingué dans \(N_G(gS’g^{-1})\), on a nécessairement \(S = gS’g^{-1}\). Donc \(S\) et \(S’\) sont conjugués.

3. Troisième théorème de Sylow : Nombre de \(p\)-sous-groupes de Sylow.

Soit \(n_p\) le nombre de \(p\)-sous-groupes de Sylow de \(G\). On fait agir \(G\) sur l’ensemble des \(p\)-sous-groupes de Sylow par conjugaison. Par le deuxième théorème de Sylow, cette action est transitive, donc il n’y a qu’une seule orbite. L’équation aux classes donne \(n_p = [G:Stab_G(S)]\), où \(S\) est un \(p\)-sous-groupe de Sylow quelconque. Or \(Stab_G(S) = N_G(S)\), et \(S \subset N_G(S)\). Donc \(n_p = [G:N_G(S)]\) divise \(|G|/|S| = m\).

On fait maintenant agir un \(p\)-sous-groupe de Sylow \(S\) sur l’ensemble des \(p\)-sous-groupes de Sylow par conjugaison. L’équation aux classes s’écrit :

\(n_p = \sum_{i=1}^t [S:Stab_S(S_i)]\)

où les \(S_i\) sont des représentants des orbites. Comme \(S\) est un \(p\)-groupe, chaque terme \([S:Stab_S(S_i)]\) est une puissance de \(p\). Si une orbite est non réduite à un point, son cardinal est divisible par \(p\). Si une orbite est réduite à un point \(S_i\), alors \(S \subset N_G(S_i)\), et comme précédemment, on en déduit \(S = S_i\). Donc il n’y a qu’une seule orbite réduite à un point, celle de \(S\). On a donc \(n_p \equiv 1 \pmod{p}\).

La démonstration du théorème de Sylow est ainsi terminée.

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